Ligament croisé antérieur

Opération   du ligament croisé antérieur (ligamentoplastie)

Mise à jour le 4 décembre 2025 – Rédigé par le Dr J. E. Perraudin, chirurgien orthopédiste.

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Vue arthroscopique de la greffe du ligament croisé antérieur

L'opération “de routine” du ligament croisé antérieur est une reconstruction du ligament par une greffe (“ligamentoplastie”)[1] [2]. réalisée en ambulatoire et sans urgence. C’est une intervention réglée, fiable, de routine, qui permet de stabiliser le genou et de reprendre foot, hand, ski et autres activités sportives à “pivot” ou “pivot-contact”.

L'autre option est la réparation simple sans greffe qui peut se discuter sur des genoux soigneusement sélectionnés (15% des cas). Elle nécessite une intervention rapide dans les trois semaines qui suivent l'accident.

Nous avons vu dans quels cas il était logique de se faire opérer.

Les différents temps de l’intervention (résumé)

L'opération nécessite l'utilisation d'une greffe tendineuse, prélevée sur le ou la patiente.

  • Testing du genou
  • Prélèvement de la greffe
  • Traitement des éventuelles lésions méniscales associées
  • Repérage des zones d'insertion tibiale et fémorale du ligament
  • Création des tunnels osseux tibial et fémoral
  • Passage de la greffe dans les tunnels
  • Fixation de la greffe d'abord au fémur
  • Mise de la greffe sous tension par traction
  • Fixation tibiale (souvent en deux temps)

Testing du genou sous anesthésie

L'intervention commence par un testing du genou sous anesthésie : il s'agit de manipuler doucement le genou pour évaluer le mouvement anormal, la laxité. Cela permet de :

Prélèvement de la greffe

Plusieurs greffes sont disponibles pour remplacer le ligament croisé antérieur. Dans les études récentes, les résultats fonctionnels sont le plus souvent proches entre les principales auto-greffes, [3] [4] [5].

Le principe de la ligamentoplastie reste le même. Nous parlons ici de la ligamentoplastie avec les tendons de la patte d'oie, appelés ischio-jambiers (ou DIDT). Il s'agit d'une auto-greffe, prélevée par une petite incision sous le genou, en interne.

DIDT : la greffe habituelle Les autres greffes

Une fois le prélèvement de la greffe réalisé, le garrot est gonflé et l'arthroscope est mis en place.

Arthroscopie du genou au bloc opératoire

Le temps arthroscopique

Après gonflage du garrot, deux petites incisions sont réalisées pour la caméra et les instruments. Les images sont transmises à un écran vidéo. L'arthroscopie permet d'abord d'explorer le genou et de rechercher :

Des lésions méniscales

Ces lésions méniscales peuvent être suturées chez le sujet jeune; parfois la conservation n'est pas possible et l'ablation de la partie rompue reste la solution.

Image sous arthroscopie d'un cyclope, fibres rompues du LCA gênant l'extension du genou
Image sous arthroscopie d'un “cyclope” : les fibres rompues du ligament croisé antérieur gênent l'extension complète du genou.
La vidéo montre le nettoyage sous arthroscopie d'un cyclope, paquet de fibres rompues du ligament qui gènent l'extension.

Le moignon restant

Les fibres rompues qui ne gènent pas l'extension du genou, sont conservées pour servir de "nourrice" : la greffe va être passée de, ce qui l'aidera à se revasculariser. (SAMBBA [6] [7])

Repérage des zones d'insertion du ligament

Il se fait sous contrôle arthroscopique, ce qui permet d'être très précis, tout en évitant de grandes cicatrices. Ce temps est très important, car va en découler la position finale de la greffe.

Le but est de reconstruire le ligament de façon anatomique : la future greffe doit se retrouver à la place du ligament d'origine, dans les restes du ligament rompu.

Voyons les zones recherchées, sur des reconstructions en 3D.

Insertion tibiale du ligament croisé antérieur
Ici sur le tibia : la flèche montre la zone d'insertion du ligament. La surface du tibia est vue du dessus avec l'avant du genou en haut de l'image.
Insertion fémorale du ligament croisé antérieur
Sur le fémur : coupe de profil avec l'avant du genou vers la gauche de la photo. L'insertion est très en arrière; elle correspond à la flèche jaune sur l'IRM ci-dessous.
IRM de profil montrant un ligament croisé antérieur normal
IRM de profil montrant un ligament croisé antérieur normal.

Utilisation du viseur

La pointe du viseur est introduite dans l'articulation et posée sur le repère choisi.

Une broche est introduite dans le canon du viseur. Elle traverse l'os et sa position est vérifiée et éventuellement modifiée.

Viseur tibial de la ligamentoplastie
Viseur tibial
Dessin montrant le principe de l'utilisation du viseur tibial
Principe du viseur tibial

Création du tunnel tibial

Le chirurgien repère par une marque au bistouri électrique la zone d'insertion sur le tibia. Le tunnel tibial apparaîtra au niveau de cette marque. Il faut imaginer que la greffe sortira du tunnel à ce niveau.

Il ne faut pas qu'elle empêche le genou de se tendre; il est donc important de bien choisir la position de la sortie du tunnel tibial dans l'articulation.

Zone d'insertion tibiale du LCA
La petite flèche noire montre le marquage de l'insertion, faite au bistouri (en regard de l'extrémité du ménisque externe).
La sortie du tunnel tibial ne doit pas gêner l'extension
Vérification de la position de la marque en extension du genou. Ici, une greffe sortant sur la marque entrerait en conflit avec le fémur; il faut donc viser plus en arrière.
Positionnement du viseur tibial
Positionnement du viseur tibial
Broche insérée dans le tibia sous arthroscopie
La broche est posée et sa position vérifiée en allongeant la jambe.
Passage d’une première mèche dans le tunnel tibial
Une première mèche est glissée sur la broche pour créer le tunnel; nouvelle vérification, puis passage de la mèche du diamètre de la greffe.
Introduction du mesureur dans le tunnel tibial
Introduction du mesureur dans le tunnel tibial
Mesure de la longueur du tunnel tibial
Mesure de la longueur du tunnel tibial avec le mesureur.

Création du tunnel fémoral sous contrôle arthroscopique

La zone d'insertion est repérée et nettoyée; le viseur se glisse en arrière et s'appuie sur le fémur. Le genou est plié complètement pour permettre de glisser une broche dans l'os : visée de dedans en dehors, de l'intérieur de l'articulation vers l'extérieur.

Une première mèche de 6 mm glisse sur la broche et crée un tunnel qui traverse la corticale, puis une deuxième mèche de la taille de la greffe (9 ou 10 mm) qui ne franchit pas la corticale.

Représentation du tunnel fémoral borgne
Représentation de l'insertion du ligament et de l'origine du tunnel dans le fémur
Insertion fémorale du ligament croisé antérieur
Vue de profil du fémur; les flèches montrent la zone d'insertion du ligament, au fond. L'insertion fémorale du ligament croisé se trouve très en arrière.
Dessin du viseur fémoral
Dessin permettant de repérer dans l'espace où se trouve l'insertion, et principe du viseur utilisé sur une vue de profil.
Insertion fémorale du LCA sous arthroscopie
Vue sous arthroscopie : le genou est plié; nous sommes dans l'échancrure et la flèche rouge indique l'insertion du LCA sur le fémur.
L'insertion du LCA est en arrière
L'extrémité du crochet se glisse en arrière au ras de l'os pour prendre appui sur le fémur
L'insertion fémorale du ligament croisé se trouve très en arrière
L'insertion fémorale du ligament croisé se trouve très en arrière.
Viseur fémoral
L'orifice de sortie de la broche est bien visible. Une broche est passée, puis une première mèche s'appuyant sur la broche, puis une deuxième de la taille de la greffe.
Fil bleu sortant du tunnel fémoral
Un fil bleu est ensuite passé dans le tunnel grâce à la broche. Il apparaît dans l'articulation, sortant du tunnel fémoral.
Pince sortant du tunnel tibial attrapant le fil bleu
La pince passée dans le tunnel tibial attrape le fil bleu.
Trajet de la future greffe du LCA entre tibia et fémur
Cette photo montre le fil bleu passant du fémur au tibia : il indique le futur positionnement de la greffe. Les flèches montrent l'orifice des tunnels.

La greffe est ensuite passée dans les tunnels

Passage de la greffe dans les tunnels
Le fil bleu permet de faire passer la greffe dans les tunnels.
Passage de la greffe DIDT avec l'endobutton
Elle est fixée sur le fémur par un endobutton.

Fixation de la greffe

Fixation fémorale en premier

L'endobutton est un moyen astucieux et très solide pour fixer la greffe sur le fémur. Il est passé à travers le tunnel en ne tirant que sur un seul fil.

Endobutton pour la fixation fémorale
Une fois la greffe passée dans les tunnels, elle est fixée sur le fémur en manœuvrant les fils de l'endobutton.
Blocage de l'endobutton par traction sur la greffe
Une fois l'endobutton « sorti » du fémur, la traction sur l'autre fil le déploie, et il s'applique sur l'os pour bloquer la greffe.
Fixation de la greffe par un endobutton fémoral
La greffe est donc fixée en haut, sur le fémur, par l'endobutton.
La mobilisation du genou permet d'apprécier l'isométrie de la greffe
La mobilisation du genou permet d'apprécier si la greffe “bouge” lors du passage de la flexion à l'extension et inversement. Si elle garde la même longueur en flexion et en extension, elle est dite isométrique

.

La notion d'isométrie

L'isométrie est liée au positionnement des orifices des tunnels tibial et fémoral.

L'isométrie de la greffe est importante :

  • Pour que la greffe reste tendue et stabilise le genou entre 0 et 60°
  • Pour que le genou ne perde pas sa mobilité : un mauvais positionnement peut entraîner une perte de l'extension avec impossibilité mécanique d’allonger le genou dès le réveil.

Pour aller plus loin, on peut noter qu'une légère anisométrie est acceptable si la greffe reste bien tendue entre 0 et 60° de flexion (pour stabiliser le genou), tout en se détendant ensuite pour permettre la flexion complète.

Fixation tibiale

Première fixation tibiale par une vis d'interférence

Plastie du LCA dans le tunnel tibial
Voici la plastie qui s'enfonce dans le tunnel tibial
Broche dans le tunnel tibial entre l'os et la greffe
La broche sort du tunnel tibial où elle passe entre l'os et la greffe. Elle va guider une vis dite d'interférence qui va appliquer la greffe contre l'os : c’est la fixation « primaire ».
Fixation tibiale de la greffe du LCA
Cette vis est résorbable; la résorption se fait petit à petit, sur environ 4 ans.
Pose de la vis d'interférence tibiale
Pendant le vissage, la greffe est tendue par traction manuelle, pendant qu'une pression est exercée sur le tibia vers l'arrière (flèche rouge) pour réduire le tiroir antérieur.

Seconde fixation des fils de traction à la sortie du tunnel

Deuxième fixation tibiale DIDT
Deux fixations au niveau du tibia valent mieux qu'une : la deuxième fixation empêche la greffe de glisser.
Parce que deux fixations valent mieux qu'une
Parce que deux fixations valent mieux qu'une !

Pose de drain ?

Drain de Redon sortant du pansement
Je ne mets pratiquement jamais de drain dans le genou : c'est douloureux, et je ne constate pas davantage de saignement ou d'hématome post-opératoire chez mes patients que chez d’autres chirurgiens qui continuent à en utiliser.

Les cicatrices

Cicatrices après opération du LCA
Suture des incisions avec des fils résorbables sur la peau. La cicatrice est recouverte (photo d'un genou gauche) de petits rubans adhésifs (stéristrips); le tout est recouvert par les pansements imperméables apportés par le patient.
Pansements après opération du ligament
Ne pas toucher au pansement pendant 10 jours; la douche est possible à partir de J2 en enroulant le genou avec un film alimentaire. Changement à 10 jours, puis ablation des pansements lors de la consultation (J+15).

Durée de l'intervention

Elle est de 45–50 minutes en moyenne, dont 30–35 minutes de garrot, selon les gestes réalisés sur les ménisques.

La technique SAMBBA

La photo ci-dessous montre une vue sous arthroscopie de la greffe à la fin de l'intervention. Elle sort du tunnel tibial dans les restes de l’ancien ligament croisé antérieur (technique appelée SAMBBA[8]).

Image arthroscopique du LCA reconstruit selon la technique habituelle (SAMBA)
Le but de cette technique (utilisée par la plupart des chirurgiens) est de préserver tous les tissus restants, car ils sont d'une part remplis de mécano-récepteurs utiles pour la proprioception, et d'autre part ces tissus vascularisés, en enveloppant la greffe, vont participer à sa revascularisation ultérieure.

Radio post-opératoire

La radio post-opératoire montre le petit endobutton métallique sur le fémur (non résorbable).

Radiographie post-opératoire d'une ligamentoplastie du LCA
Radio de profil du genou après ligamentoplastie
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Références (reconstruction du LCA par greffe)

  1. Ebert JR, Calvert ND, Radic R, et al. A Prospective Randomized Controlled Trial Investigating Quadriceps Versus Hamstring Tendon Autograft in Anterior Cruciate Ligament Reconstruction. Am J Sports Med. 2024;52(3):660–669. doi:10.1177/03635465231222279. PubMed.

    • Essai randomisé : QT vs ischio-jambiers (HT) avec suivi jusqu’à 24 mois.
    • Résultats cliniques globaux proches (PROMs, laxité), profils de récupération de force différents selon la greffe.

    ↩ Retour au texte

  2. Raj S, Ridha A, Searle HKC, et al. Quadriceps tendon versus hamstring tendon graft for primary anterior cruciate ligament reconstruction: A systematic review and meta-analysis of randomised trials. Knee. 2024;49:226–240. doi:10.1016/j.knee.2024.07.002. PubMed.

    ↩ Retour au texte

  3. Migliorini F, Torsiello E, Trivellas A, et al. Bone-patellar tendon-bone versus two- and four-strand hamstring tendon autografts for ACL reconstruction in young adults: a Bayesian network meta-analysis. Sci Rep. 2023;13:6883. (Publié le 27 avril 2023). Texte.

    • Comparaison large BPTB vs ischio-jambiers (2 brins / 4 brins) : stabilité, PROMs, douleurs antérieures.
    • Message pratique : compromis entre stabilité et symptômes au site de prélèvement (douleur antérieure plus fréquente avec BPTB).

    ↩ Retour au texte

  4. Hurley ET, et al. Quadriceps tendon has a lower re-rupture rate than hamstring tendon autograft for anterior cruciate ligament reconstruction – A meta-analysis. J ISAKOS. 2022. doi:10.1016/j.jisako.2021.10.001. PubMed.

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  5. Tan TK, Subramaniam AG, Ebert JR, Radic R. Quadriceps Tendon Versus Hamstring Tendon Autografts for Anterior Cruciate Ligament Reconstruction: A Systematic Review and Meta-analysis. Am J Sports Med. 2022;50(14):3974–3986. doi:10.1177/03635465211033995. PubMed.

    ↩ Retour au texte

  6. Hopper GP, Philippe C, El Helou A, et al. Single AnteroMedial Bundle Biological Augmentation (SAMBBA) Plus Technique for Combined ACL Repair and Reconstruction. Arthrosc Tech. 2023;12(1):e135–e139. doi:10.1016/j.eats.2022.09.003. PubMed.

    • Technique “SAMBBA” : préserver des fibres natives pour favoriser l’environnement biologique autour de la greffe.
    • Intérêt théorique : vascularisation/synovialisation et proprioception.

    ↩ Retour au texte

  7. Moutzouros V, Castle JP, Gasparro MA, et al. Anterior cruciate ligament hybrid remnant preservation reconstruction demonstrates equivalent patient-reported outcomes and complications as traditional anterior cruciate ligament reconstruction after 1 year. Arthrosc Sports Med Rehabil. 2024;6(2):100875. Texte (PMC).

    ↩ Retour au texte

  8. Gopinatth V, Tartibi S, Smith MV, et al. Long-term Results of Bone-Patellar Tendon-Bone Versus Hamstring Tendon Autograft for Primary Anterior Cruciate Ligament Reconstruction: A Meta-analysis of Randomized Controlled Trials. Orthop J Sports Med. 2025;13(4). doi:10.1177/23259671251330307. PubMed.

    • Méta-analyse d’essais randomisés avec recul ≥ 10 ans : BTB vs HT.
    • Message “long terme” : résultats globaux comparables entre BTB et HT, et l’arthrose progresse davantage dans le genou opéré que dans le genou sain controlatéral.

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Docteur J.E. Perraudin